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le blog d'Emmanuel Maurel
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5 mars 2009

partage salaires profits : débat

Ci jointe ne tribune écrite par mes amis Paul Quilès et David Cayla, membres, comme moi, du club Gauche Avenir. Il a été publié dans Libération du 5 mars 2009.

C'est une réponse à un texte paru dans ce quotidien et qui se montrait critique à l'égard de la gauche, à propos du partage entre les salaires et le profit.
Ce thème sera, parmi bien d'autres, abordé dans le Forum que nous préparons pour examiner les conséquences de la crise économique et les réponses qu'il faut y apporter.
                                          
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Dans Libération du 18 février, Grégoire Biseau sermonnait la gauche qui, selon lui, se serait « enlisée » dans un discours falsificateur sur le partage entre salaire et profit. S'appuyant sur les travaux de Thomas Piketty et de Denis Clerc, il affirmait que cette répartition serait stable depuis 1988 et proche de ce qu'elle était dans les années 60. Il fustigeait les hommes politiques qui évoquent la diminution relative des salaires par rapport aux revenus du capital et qui font preuve d'une « habile mauvaise foi politicienne ».

           Nous ne partageons ni son analyse ni son jugement. Reprenons en effet ses deux critiques, en les confrontant à des données incontestables.

1-    « Aucun économiste de gauche qui a un peu travaillé sur la question n'affirme le contraire ».

Cette affirmation légèrement polémique ne tient pas. Il suffit de lire par exemple les travaux de Michel Husson, qui répond point par point à l'analyse de Denis Clerc et qui montre que la part des salaires dans l'économie a diminué de 4,6 points entre 1968 et 2006. Husson n'est d'ailleurs pas le seul. La Commission européenne est arrivée au même constat dans un récent rapport[1]. Même Alan Greenspan s'en est publiquement inquiété dans une interview au Financial Time[2]. D’autres études très sérieuses -trop nombreuses pour être toutes évoquées ici- montrent que, dans presque toutes les économies développées, la part des salaires dans la valeur ajouté a diminué et diminue encore.

2-    « Rien dans les statistiques » ne révèlerait un changement dans la répartition des richesses depuis 1988.

C’est inexact : considérons des chiffres simples et non des reconstructions alambiquées, sur des bases plus ou moins idéologiques. Entre 1988 et 2007, la richesse par habitant a augmenté de 33% (statistique de l'INSEE, disponible sur Internet et facilement vérifiable). Pendant la même période, le pouvoir d'achat du salaire net moyen n'a augmenté que de 11,6%, alors que les revenus des actionnaires[3] ont augmenté de 332%. On ne voit pas comment cet écart pourrait s'expliquer dans le cadre d'un partage « stable ».

           Il est regrettable que ce débat se soit focalisé sur le fameux concept de répartition de la valeur ajoutée. Il s'agit de ce que les économistes appellent la « répartition primaire », c'est à dire la répartition avant que les administrations interviennent et imposent de nouvelles règles de partage. Or, les administrations représentent plus de la moitié du PIB et leur action n'est pas neutre. C’est ainsi que, depuis 1988, le coût de la sécurité sociale a augmenté de 18,5% du PIB à 22%, ce qui s’explique par le fait que la France a vieilli et que les retraités sont plus nombreux. C'est le prix de notre modèle social, mais sur qui a pesé ce coût ? Pas sur les entreprises, dont l'effort en matière de cotisations sociales a diminué sur la même période. Si l’on appliquait aux entreprises d'aujourd'hui le taux de cotisations sociales de 1988, on dégagerait près de 20 milliards d'euros de ressources supplémentaires pour la sécurité sociale, de quoi combler largement le célèbre « trou de la sécu » !

           Les salariés sont donc bien les grands perdants du partage des richesses en France, puisqu’au cours des 20 dernières années, l'augmentation des revenus salariaux a été inférieure à l'augmentation de la richesse créée, alors que les revenus des actionnaires ont été multipliés par quatre. De plus, la politique fiscale a protégé les entreprises en faisant peser sur les seuls ménages le coût du vieillissement de la population.

           C'est tout à l'honneur de la gauche de dénoncer cette baisse des salaires dans le partage des richesses, de montrer que l’insuffisance de pouvoir d’achat des salaires est une des causes de la crise et de se battre pour plus de justice. 


1-  Employment in Europe 2007, Chapter 5: The Labour Income Share in the European Union (site Internet de l'UE).

2-    Guha K., « A global outlook », Financial Times, 16 septembre 2007.

3-  Entre 1988 et 2007, les profits distribués aux sociétés non financières sont passés de 17,7 milliards d'euros à 76,6 milliards.

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Commentaires
P
Etonnant que Denis clerc ait tenu de pareilles affirmations...Ce n'est pas le style d'alternatives économiques<br /> <br /> alain résume très bien ma pensée :-))<br /> <br /> C'est pas le tout mais malgré ces sacrifices financiers et le serrage de ceinture , le dieu marché n'est toujours pas rassuré...<br /> <br /> Il a peur qu'à trop prélever dans les mêmes poches , mais en laissant en paix nos riches rentiers et actionnaires ,le citron n'aie plus de jus !<br /> <br /> Et là resteraient les pépins !<br /> <br /> Faudrait accorder les violons avant la valse !<br /> <br /> Au fait que pense notre ami socialiste du FMI ?
S
« Les caisses de l’Etat sont vides » : voyons d’un peu plus près ce qui signifie (et cache) cette affirmation.<br /> <br /> <br /> I) Le coût de la dépendance de l’Etat vis-à-vis des marchés financiers + l’injustice fiscale = 190 Milliards d’euros de manque à gagner par an<br /> <br /> <br /> -Le montant de la dette publique publique était,suivant des sources fiables,à la fin de l’année 2009 de 1489 milliards d’euros,soit 77,6 % du PIB(soit les 3 /4 des richesses produites annuellement par la France).Depuis 1980 l’Etat français a versé aux marchés financiers plus de 1150 milliards d’euros d’intérêts et continue à verser annuellement à ces organismes financiers 50 milliards d’euros au titre des intérêts de la dette.Ces 50 milliards correspondent à ce que l’on appelle la charge de la dette(intérêts seuls)tandis que 30 milliards sont versés au titre du capital remboursé.La charge de la dette est le 2 ème poste budgétaire de l’Etat.<br /> <br /> -L’Etat n’étant plus autorisé depuis 1973 à emprunter auprès de la banque de France,bien qu’elle soit propriété de l’Etat,et ne pouvant pas davantage emprunter à la Banque Centrale Européenne(depuis les accords de Maastricht de 1992)doit recourir également à des institutions privées,aux marchés financiers afin de financer ses besoins(investissements,frais de fonctionnement..etc).Ces établissements financiers-banques,organismes de crédit-créent ou émettent alors de la monnaie et demandent à leur créancier-à savoir l’Etat français-de leur verser,en sus du capital remboursé,des intérêts qui s’élèvent annuellement à 40 milliards d’euros(300 milliards d’intérêts annuels versés aux banques privées dans la zone euro),selon les calculs et chiffres avancés par la très sérieuse étude dûe à André-Jacques Holbecq et Philippe Derudder(La dette publique,une affaire rentable.A qui profite le système ? Ed. Yves Michel, 2008).<br /> <br /> -C’est donc toute la collectivité domiciliée en France qui est contrainte de supporter le poids de plus en plus lourd de cette dette,à payer les frais liés à la dépendance de l’Etat vis-à-vis des marchés financiers.Le coût de cette dépendance s’élève annuellement à 90 milliards d’euros,l’Etat français ayant perdu le monopole(droit régalien par excellence)de l’émission monétaire,ce rôle étant dévolu à des institutions privées(pour l’essentiel)et l’Etat ne pouvant emprunter ni auprès de la banque de France ni auprès de la BCE les traités européens l’interdisant expressément.<br /> <br /> -A cette dépendance vis-à-vis des marchés financiers il faut ajouter un ensemble de mesures ou pratiques dûes à des particuliers ou sociétés privées qui relèvent de l’injustice fiscale.Ainsi,on estime(là encore nous en sommes réduits à des estimations mais les ordres de grandeur restent tout-à-fait significatifs)à 50 milliards d’euros le manque à gagner dû à l’évasion fiscale(pour échapper au fisc,à l’impôt)chaque année.Les niches fiscales(un ensemble de dispositions qui relèvent presque toutes de l’inéquité quand ce n’est pas l’injustice la plus inadmissible)représentent,à ce jour,un manque à gagner,pour l’Etat,de 50 milliards d’euros par an.Le « bouclier fiscal »,contrairement à certaines idées reçues,ne fait perdre à l’Etat, « que » 600 millions d’euros par an.Mais la symbolique dont il est porteur est très significative :l’Etat envoie des chèques aux montants non dérisoires,au nom du Trésor Public,à des gens déjà très riches.<br /> <br /> <br /> II) Mettre fin à la dépendance de l’Etat vis-à-vis des marchés financiers + mettre fin aux privilèges fiscaux = dette publique réglée en un peu plus de 5 ans malgré une conjoncture économique défavorable<br /> <br /> <br /> L’ensemble des dispositions-datant pour certaines des années 1970-et contraintes détaillées ci-dessus permettent d’estimer à 190 milliards annuels le manque à gagner,pour les finances publiques :dépendance vis-à-vis des marchés financiers pour moitié,l’autre moitié étant imputable à l’inégalité des Français devant l’impôt ou,si l’on préfère,à l’injustice fiscale.On peut pourtant estimer à environ cinq ans le temps nécessaire à l’Etat français pour régler la question de la dette publique.Pour ce faire,l’Etat doit tout d’abord reprendre le contrôle de l’émission monétaire-via la nationalisation des banques/organismes de crédit et la remise en cause des traités européens-afin de s’affranchir des marchés financiers.Les marchés financiers sont en train d’étrangler l’Etat français(ainsi que d’autres Etats)au moyen de l’explosion de la dette publique.Ensuite,il convient que l’Etat français mette un terme à ce que l’on peut appeler des privilèges fiscaux.Ces privilèges fiscaux sont,certes,un forme efficace de clientélisme électoral et une excellente méthode pédagogique inculquant l’incivisme comme la haine de l’intérêt général et de la patrie mais ils font désormais courir à la France des risques qu’il conviendrait de ne plus dissimuler à la population.En effet,le manque à gagner,que l’on peut estimer globalement à 200 milliards par an,actuellement supporté par l’ensemble de la population(sans-papiers compris)a fait exploser la dette publique et sa croissance est continue.Les efforts demandés à la population,encore récemment,ne suffiront pas à enrayer la croissance de cette dette.Il n’y aura pas le compte.Donc,il est prévu d’allonger la durée du travail,c’est-à-dire la durée des cotisations retraite,en repoussant l’âge de départ à la retraite,les salaires des fonctionnaires resteront bloqués,l’emploi sera davantage précarisé afin de satisfaire les exigences des entreprises elles-mêmes dépendant des établissements financiers auxquels elles versent des intérêts,l’ensemble des dépenses publiques seront encore diminuées(baisse des crédits pour l’éducation,la recherche,vente du patrimoine de l’Etat ..etc) car rendues responsables de la dette publique.Les dépenses publiques viennent d’ailleurs d’être gelées jusqu’en 2013.Il n’y aura toujours pas le compte étant entendu que la croissance,suivant les anticipations/estimations produites par des organismes tels que l’OCDE,sera presque nulle.Ansi,il sera nécessaire de faire appel au Dr Strauss-Khan qui,comme chacun sait désormais,est un expert pour appliquer la méthode du garrot.<br /> <br /> <br /> <br /> Un citoyen français qui a pris quelques heures pour voir d’un peu plus près ce que l’on entendait par « dette publique » et les moyens permettant de la régler à moins que la disparition de l’Etat ne soit déjà programmée.
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